L'Atelier Arteinscena

 

 Présentait, au Théâtre de l'Isle 80, dimanche 5 juin à 20h30, «Nouvelles et Récits de jeunesse » d'Anton Tchekhov. Il s'agissait de « Chronologie », «Monsieur Jules », «Marchandise humaine », «Le Chant du Cygne », «Zina », et «Le petit Pigeon»: un enchaînement de six scènes courtes, mises en scène par Lucia Pozzi , traduites, transformées et adaptées selon le cas par Lucia et/ou Michel, et présentées avec une réelle complicité par des artistes amateurs. «Amour », «Humour» et «Malice» étaient au rendez-vous pour évoquer la palette dont se sert Tchekhov pour peindre le train-train de la petite bourgeoisie russe du XIXe.

 

 

« Nouvelles et Récits de jeunesse» d'Anton Tchekhov

 

 
 

« Chronologie» : la chronologie révélatrice de certains évènements fortuits ...

 

Une petite bourgeoisie qui évoque le passé avec nostalgie, s'ennuie un peu, qui est susceptible de s'emballer pour être dépassée aussitôt par les évènements qu'elle provoque, qui accepte ce qui lui arrive tout en manifestant de l'étonnement, d'autant qu'en fond de tableau les personnages qui la composent désirent vivre un grand amour, sans véritablement y croire, tout en faisant semblant d'y croire pour être rattrapés in fine par l'absurde mesquinerie de leur comportement. C'est que Tchekhov préfère décrire par touches successives le caractère des personnages, le paradoxe des situations, le rapport à la domesticité, les jeux de pouvoir, la chronologie révélatrice de certains évènements fortuits, plutôt que de développer brutalement des drames compliqués ou épouvantables.

 

 

« Monsieur Jules », le rapport à la domesticité, les jeux de pouvoir ...

 


 
 

« Marchandise humaine» : une histoire de ponton pour prix d'une relation amoureuse!!

 

Ce penchant impressionniste de l'auteur a été bien mis en évidence ce soir par les comédiennes Lucie, Giulia, Monique et Elena et les comédiens Fabien, Hervé et Michel. Elles et ils surent avec un très grand naturel et du talent s'approprier l'œuvre de Tchekhov, pour placer les différents personnages au centre de l'action et présenter leurs manières d'agir ou leurs façons de penser, parfois naïves, ridicules, tristes, voire un petit peu perverses (mot pris au bon sens du terme). Les jeux des comédiennes et des comédiens furent valorisés par le réalisme des costumes très XIXe que soulignaient des pointes de couleur: un éventail rouge, une rose dans les cheveux, une arme blanche, des médailles, une lampe bleue pour le coup de Blues ... et par le rythme de la mise en scène aux enchaînements particulièrement astucieux de Lucia Pozzi.

 

 

« Le Chant du Cygne» : il n y a pas de héros dans le théâtre de Tchekhov. Il y a juste des personnages confrontés à leur passé et ...

 

Pas de gentils et pas de méchants de manière tranchée : il n'y a pas de héros dans le théâtre de Tchekhov. Mais, il y a de magnifiques et sympathiques manipulatrices et des personnages confrontés à leur passé, à leurs habitudes et à l'usure du temps qui essaient de vivre avec ce que la nature leur a accordé comme talents ou comme défauts. C'est ce rapport décalé à la réalité des personnages qui selon le cas ne manquent pas quelque fois de vanité qui est à l'origine d'un comique de situation et qui permet (nous l'avons appris au moment du joyeux débriefing devant la porte du théâtre: 18 place des 3 Pilats) à certains comédiens d'improviser des réponses (par exemple: introduire un ponton pour prix d'une relation amoureuse! !).


 

Dans le fond, les protagonistes du théâtre de Tchekhov ce soir nous ressemblaient trop pour que nous ne puissions au final ne pas les aimer.

 

 

 

« Zina » et « Le petit Pigeon» : ... Pour vivre avec ce que la nature leur a accordé comme talents ou comme défauts ...

 

 

Le 7 juin 2016 - Alain Maldonado